Journal La République. Ligne à grande vitesse : une facture salée pour les Pyrénées-Atlantiques ?

Nov 3, 2016 | Ferroviaire, Presse française

Ligne à grande vitesse : une facture salée pour les Pyrénées-Atlantiques ?
Le Département doit encore près de 40 millions d’euros pour financer le tronçon Tours-Bordeaux de la LGV Sud-Atlantique. Un « risque financier essentiel » qui pèse sur la collectivité.

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PAR SÉBASTIEN LAMARQUE, PUBLIÉ LE .

La chambre régionale des comptes rappelle que le Département peut être sommé de régler les 40 millions d’euros qu’il doit pour la Ligne à grande vitesse Tours-Bordeaux. Inquiétant.

C’est une épée de Damoclès à 40 millions d’euros qui pèse sur le département des Pyrénées-Atlantiques. Pour la chambre régionale des comptes Aquitaine Limousin Poitou-Charentes, qui a rendu le 28 octobre dernier son rapport sur la gestion du Département entre 2009 et 2014, c’est même un « risque financier essentiel » : l’argent de la Ligne à grande vitesse (LGV) entre Tours et Bordeaux que le Département doit à SNCF réseau. Et localement, les présidents successifs du Département se renvoient la balle, façon bourre-pif.

Le 28 avril 2011, le Département s’engage, parmi 59 collectivités, à participer au financement de la LGV entre Tours et Bordeaux. Une convention est signée par le président du conseil général de l’époque, Georges Labazée, avec la ministre des Transports, Nathalie Kosciusko-Morizet. « J’ai pris la présidence le 31 mars 2011, je n’ai pas inventé cet accord en trois semaines », se défend « Jo » Labazée.

40 millions à débourser

C’est que l’actuel président centriste du Département, Jean-Jacques Lasserre, fustige « une véritable arnaque pour notre département ».Pour lui, « la répartition financière entre les régions et les départements n’est pas logique, elle est même injuste. »

Au départ, la participation à la LGV est assortie de « contreparties » en faveur du département, notamment sur les routes : l’État s’engage à intervenir financièrement sur la déviation d’Oloron ou sur les coûteux travaux de la D1 en direction de Bayonne (42 millions d’euros). Il est surtout question que la LGV irrigue non seulement Bayonne mais aussi Pau. Un engagement qui tombe rapidement. Et le 27 septembre 2013, l’assemblée départementale décide de suspendre les paiements de la LGV. « Sauf que la convention vit toujours, s’inquiète Jean-Jacques Lasserre. Et c’est une affaire qui m’inquiète énormément. »

Il y a de quoi. La chambre régionale des comptes rappelle qu’il reste « près de 40 millions d’euros à débourser ». Elle note que « le montant des provisions constituées par le Département au titre de la LGV s’élève, à la fin de l’année 2014, à 17,5 M€ et qu’aucun provisionnement supplémentaire n’a été effectué en 2015. » Et la chambre « ne peut que recommander » au Département de continuer par « prudence comptable » à provisionner les sommes dues à SNCF réseau.

« Péché originel »

« Nous sommes dans une situation de très grand risque financier et c’est le fait de la gestion de mes prédécesseurs », se plaint Jean-Jacques Lasserre. Attaque à laquelle l’ancien président Labazée répond vertement : « Cette convention a été négociée par mes prédécesseurs, dont Jean-Jacques Lasserre, avec l’ancien ministre des Transports, Dominique Bussereau. Lasserre n’a qu’à l’interpeller, puisque Bussereau, président du département de la Charente-Maritime dénonce lui aussi l’accord qu’il a contribué à créer lorsqu’il était ministre. » Et de vilipender le terme d’arnaque utilisé par Jean-Jacques Lasserre. « C’est son style. La démocratie mérite mieux que ces mots. Il y a eu un péché originel. Et après, vous êtes obligés de vous confesser pendant des années. »

De son côté, Jean-Jacques Lasserre imagine mal régler une facture qu’il juge injuste. « Financièrement, c’est totalement inacceptable, tranche-t-il. Il faudrait recourir à un très gros emprunt. Si on devait faire peser cette dette sur le contribuable, cela reviendrait à augmenter de 40 % la taxe foncière ! Je n’ose y penser. » Sauf que, le 4 août dernier, le ministre Alain Vidalies a été très clair. Toutes les collectivités signataires devront payer.

Un front commun contre la LGV

Le département des Pyrénées-Atlantiques et les agglomérations de Pau et Bayonne ont décidé cet été de faire « front commun » pour refuser de verser le solde de leur part de financement de la ligne à grande vitesse (LGV) Tours-Bordeaux. Outre « la répartition injuste entre les collectivités », ils déplorent que les prolongements entre Bordeaux et Dax d’une part et vers Bayonne d’autre part ne soient annoncés que pour 2027 et 2032. « Il serait scandaleux de devoir payer pour une ligne qu’on ne verra qu’aux calendes grecques dans notre département ». Une procédure a été engagée pour dénoncer la convention.

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