La collectivité doit encore payer un solde de 9 millions. Une somme inscrite au budget hier soir.
Dans les conseils à Pau, depuis 2014, on a pris l’habitude de refaire le match, disséquant les décisions du passé pour alimenter les débats du présent. Ce jeudi, c’est « l’affaire » du financement de la LGV (ligne à grande vitesse) entre Tours et Bordeaux, opérationnelle à partir de dimanche, qui s’est invitée en séance d’agglo. Comme le Département et son homologue de Bayonne, elle a été récemment condamnée par le tribunal administratif à payer le solde de sa contribution (notre édition de jeudi).
Il n’en fallait pas plus pour attiser les échanges de patate chaude entre l’actuelle majorité et les membres de l’ancienne gouvernance. Un sujet « lourd, pénalisant pour notre collectivité. On s’y était opposé à l’époque comme conseillers municipaux de Pau » rappelle d’emblée François Bayrou. Se dégageant ainsi de toute responsabilité mais aujourd’hui forcé d’hériter d’une situation « détestable ».
« UN CHOIX SANS PRENDRE DE GARANTIE »
« L’Agglo, sa présidente, le conseil, avaient choisi de prendre l’engagement qu’on financerait la LGV à hauteur de 21 millions d’euros, cela sans prendre la moindre garantie. Sauf avec la promesse implicite, en retour, de bénéficier d’une desserte paloise » retrace le maire-président. Or, « même un grand nombre de collectivités qui allaient bénéficier directement de la LGV, notamment de Poitou-Charentes, avaient refusé de participer. Et la LGV s’est faite quand même ».
Taxant ses prédécesseurs de « naïveté », la majorité actuelle a engagé un recours devant le tribunal administratif, à force de plusieurs arguments : la non prise en compte d’un barreau LGV vers Pau. « On nous a également présenté un document qui implicitement était un faux puisqu’il donnait à croire que tout le monde allait signer. En réalité, moins de la moitié des collectivités s’est engagée. En outre, on pouvait s’attendre à de nombreuses liaisons quotidiennes vers Pau. Ce sera assez peu en réalité : quatre. On est loin des engagements pris ».
JUSQU’AU CONSEIL D’ETAT S’IL LE FAUT
Face à ce constat, l’équipe de Martine Lignières-Cassou, dès 2013, avait finalement suspendu les paiements, « mais sans remise en cause juridique. D’où la situation précaire actuelle » précise l’édile palois. Sur les 21 millions à payer, 9 le sont donc encore, « et on ne peut pas faire autrement. Las, cela représente plus de la moitié de l’investissement annuel de notre Agglo. C’est très grave. Cela va mettre nos finances dans une situation difficile ». Comme il nous l’indiquait dès mercredi, François Bayrou a fait appel de la décision du tribunal, « on ira devant la cour administrative d’appel et même devant le Conseil d’Etat s’il le faut ».
Le maire de Billère Jean-Yves Lalanne, pour sa part, voulut déjà mettre dans la balance les atouts de la LGV. « On va gagner une heure et réduire la distance entre Pau et Paris. On va certainement gagner 500 000 voyageurs en gare de Pau et cela va générer de l’attractivité ». ça, ce sont les points positifs que l’élu a désiré mettre à l’actif de la précédente majorité. Comme pour la défendre. Quant au solde, le Billérois a un avis tranché : il faut carrément refuser de payer.
« IL FAUT REFUSER DE PAYER »
« Ces grands travaux doivent l’être par l’Etat ou l’Europe. Il ne faut pas payer puisque l’Etat n’assume pas la totalité des engagements pris. Ce n’est pas le sens des délibérations votées par ce conseil en 2009. Il faut résister, constituer un front commun avec les collectivités dans notre situation, quitte à créer une crise et à solliciter le gouvernement pour qu’il participe. Il faut arrêter de chercher des boucs émissaires et trouver une solution ».
« Mais vos réserves sur le financement n’ont pas été retenues par votre propre majorité » lui répondra François Bayrou, en s’appuyant sur une délibération passée « où l’on apprend que c’est sur demande du préfet de région qu’elles ont disparu. De le voir écrit, ça fait mal » lâche le président. « En outre, c’est la convention qui prévaut sur les délibérations » ajoute le chargé des finances Jean-Louis Péres. Critiquant lui aussi « beaucoup d’imprudence et d’imprévoyance ».
« On a fait un compromis, contraint et forcé. Si on n’avait rien décidé, on nous aurait reproché d’être contre le désenclavement de notre territoire » tenta de répliquer Jean-Yves Lalanne. Chez Michèle Laban-Winograd, maire d’Artigueloutan, c’est le sentiment de « tromperie » qui persiste, préférant toutefois que l’Agglo « se donne un peu de temps pour voir si la LGV a effectivement des retombées. Certes, pour gagner une heure, 20 millions c’est beaucoup. Mais on finance aussi des stades pour 20 millions. Moi, entre aller à Paris de temps en temps ou au stade, je sais ce que je préfère…» «Oui, mais notre LGV à nous nous mène droit dans le mur » assaisonnera le communiste Olivier Dartigolles, avant que les 9 millions ne soient inscrits au budget.
Un peu plus tard, c’est l’arrivée de la première année de médecine à l’UPPA qui fut abordée. Là, au contraire de la LGV, tout le monde a paru en revendiquer la paternité. De François Bayrou qui aurait convaincu tous les partenaires, à « l’ancienne majorité qui lança le projet » rappela Christian Laine. Sans oublier « le conseil régional et l’hôpital, qui étaient déjà convaincus » rétorqua Valérie Revel. Personne ici pour passer à son voisin…