Face aux camions, la vallée d’Aspe se réveille et se révolte

Sep 15, 2018 | Presse française, Routier

Face aux camions, la vallée d’Aspe se réveille et se révolte
Plus de deux semaines et six manifestations après l’accident au fort du Portalet, la mobilisation ne faiblit pas.

© jean testemale
 
PAR JEAN TESTEMALE, PUBLIÉ LE , MODIFIÉ .

Comme dans les années 90, de nombreux Aspois s’opposent au trafic international qui touche leur vallée.

Ce vendredi encore, une centaine de personnes a manifesté sur la R134, à Accous, et bloqué le passage des poids lourds pendant près de deux heures. Plus de deux semaines et six manifestations après l’accident au fort du Portalet, cette mobilisation ne faiblit pas, et même semble se structurer et prendre de l’ampleur. La mort du chauffeur du poids lourd transportant du chlorure de sodium et la pollution du gave d’Aspe ont provoqué une réaction spontanée de valléens prêts à s’opposer physiquement au flot de camions qui se déverse sur la route entre le Somport et Oloron.

Une réunion, des actions

Il y a d’abord eu une réunion à Borce, à l’initiative du maire par intérim de la commune, Didier Bayens, pour trouver des solutions au problème de l’afflux massif de camions. Entre solutions à long terme ou à court terme, une partie de l’assemblée a choisi l’action directe : bloquer la circulation, brièvement mais le plus souvent possible. Seuls quelques-uns des participants à cette réunion avaient évoqué cette option, mais le soir même, des dizaines de SMS étaient envoyés, appelant à l’action dès le lendemain soir. L’idée : « Harceler les transporteurs jusqu’à ce qu’ils se découragent à passer par ici ».

Une réussite pour les plus actifs des manifestants : plus de 100 personnes étaient présentes sur le rond-point un dimanche à 22 h. Parmi elles, beaucoup de locaux habitués de ce genre de combat, s’étant déjà mobilisés contre le percement du tunnel du Somport. « A l’époque, on a pris le problème à l’envers », explique Monique, de Bedous. « Il aurait fallu dévier la route des villages et sécuriser les riverains, avant de creuser le tunnel », explique-t-elle. « Maintenant, si on fait des aménagements sur cette route, ça ne fera qu’augmenter le trafic ». Son amie Murielle, bergère, approuve, et comme elle, la plupart des manifestants refuse désormais les travaux censés sécuriser la circulation, de peur d’inciter encore plus les transporteurs à utiliser cet axe.

Tous les poids lourds sont visés

Au-delà du transport de matières dangereuses, dont tous réclament l’interdiction sur cette route, c’est l’ensemble du trafic international qui est visé. « Certains des chauffeurs qu’on bloque partent du Portugal et vont en Hollande. Ils n’ont rien à faire ici », estime un habitant d’Aydius, persuadé que le trafic a doublé « depuis la mise en place d’un péage au Pays Basque ». Comme lui, Didier Bayens ou Gérard Darsonville, ainsi que les maires d’Accous et Bedous, visent avant tout le transport de matières dangereuses, mais réclament aussi la « régulation » du trafic de tous les autres camions.

Si l’on sent, en creux, une critique d’un système économique engendrant toujours plus de transports, on ne trouve pas pour autant d’utopistes ou d’écologistes pensant changer le monde au rond-point d’Accous. Seulement des citoyens, de tout âge et de tous horizons, « désireux de faire respecter leur environnement, leur sécurité, et de ne pas être sacrifiés sur l’autel des échanges économiques ».

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