Au-delà du Somport, plusieurs énormes chantiers doivent relier trois autoroutes, de Lérida à Saragosse, en passant par Huesca et Jaca. Vu du Béarn, le contraste est saisissant.
Situé dans la région de Huesca, au nord de l´Aragon, le col de Monrepós est un couloir stratégique où viennent s´embrancher la A22, en provenance de Lérida, et la A23 qui file en direction du Somport. Plus au Nord, à hauteur de Jaca, cette A23, appelée aussi E7, est rejointe par la A21 qui vient de Pampelune. Au terme des travaux, ces trois autoroutes formeront un « pont » entre la Navarre et la Catalogne.
De gigantesques viaducs
Les 34 millions d´euros octroyés par le gouvernement espagnol pour l´année 2017, destinés à relancer plusieurs tronçons du col, semblent confirmer son engagement pour le développement des infrastructures autoroutières aragonaises, pendant longtemps passées aux oubliettes. Et l’objectif, outre l’axe catalo-navarrais, demeure une connection supplémentaire avec la France et le tunnel du Somport, situé juste au-dessus de Jaca.
À l´horizon, la vue des gigantesques silhouettes des viaducs donne un avant-goût de l´ampleur du projet : la roche se perfore pour convertir l´actuelle nationale N330 en autoroute, les tunnels se creusent pour rejoindre ceux déjà existants. Sur le bitume, les agents de sécurité routière assurent la circulation, tandis que ça et là, ingénieurs, ouvriers et gros engins sillonnent les nombreux chantiers.
À l´heure actuelle, pas moins de trois voies souterraines sont en travaux dans la zone : entre les gorges d´Isuela et Arguis, puis dans le haut de Monrepòs, vers Caldearenas, avec un tunnel de plus de 2 885 mètres de long, et un dernier ouvrage dans le sens Caldearenas-Lanave, qui était paralysé depuis 2014.
Au total, plus de huit tunnels, représentant un total de 8 km, alimenteront l´accès au col. Des travaux que l’automobiliste qui descend du Somport en direction de Huesca ne peut ignorer.
Dix tunnels connectés
Le projet inclut une douzaine de viaducs. Dans la zone de Caldearenas-Lanave, en direction de Sabiñanigo, deux ouvrages spectaculaires surplombent les ravins d´Atos et de Fontanal. Un autre est en phase de finition dans la zone de la rivière de Guarga.
Le centre de contrôle d´Arguis, situé à l´entrée du col, est déjà en fonctionnement. Il veillera sur les trafics de l´ensemble des voies souterraines. Dix tunnels au total seront reliés à un réseau de 32 caméras rivées sur les automobilistes. Un système d´alerte, destiné à informer les usagers en cas d´incident, et de détection de mouvements suspects (piétons ou objets sur les voies) complétera le dispositif.
Pas de changement en revanche sur l´axe Jaca-Somport qui reste toujours connecté via la nationale N330, déclarée comme l´une des plus dangereuses d´Espagne. Ce dernier bout de trajet vers l’Espagne constituerait l’achèvement de l’axe E7, et rapprocherait encore plus Saragosse du Béarn. Mais pour y parvenir, il faudrait sans doute que quelques signes soient envoyés du côté français des Pyrénées. Ce qui ne semble pas, outre le projet de liaison ferroviaire Pau-Saragosse, spécialement dans l’air du temps.
Axe Pau-Somport : BAP prépare une initiative à la rentrée
Du côté des Pyrénées-Atlantiques, certains se battent toujours pour redonner vie à un axe transfrontalier consistant. Mais leur combat est loin d’être gagné.
« Avec tous les efforts que n’ont jamais cessé de faire les Espagnols, nous considérons que l’inertie des Français est indigne. » Pierre Saubot, président de Béarn-Adour Pyrénées (BAP), ne mâche pas ses mots. Il s’indigne encore au sujet du train Oloron-Bedous : « Je trouve choquant et incompréhensible qu’on ait installé une palanquère pour protéger les passagers du train en vallée d’Aspe, alors qu’il n’y a rien pour les usagers de la route qui est située entre la montagne et la voie ferrée. »
Une manifestation en octobre
Il ne fait pas que parler puisqu’avec son association, il prépare une initiative pour la rentrée. « Nous sommes en train de mobiliser les forces vives, les milieux patronaux et les politiques qui voudront se joindre à nous pour une manifestation visible et significative au mois d’octobre », indique-il. Le président de BAP constate que, mis à part la déviation de Gurmençon qui apparaît être sur les rails bien que les expropriations traînent en longueur, et celle d’Oloron (Est), les choses sont au point mort. Pour lui et ses amis, l’axe E7 est toujours pertinent jusqu’au Somport au Sud et jusqu’à Limoges au Nord. Il considère que la route nouvelle Lescar-Oloron est loin d’être enterrée.
Rail et route « complémentaires »
« Les opposants qui attaquaient la bande des 300 mètres ont perdu », analyse Pierre Saubot qui souhaite une relance du dossier au plus vite. Également partisan de la poursuite de ligne ferroviaire jusqu’au Somport et au-delà vers Saragosse, il considère que rail et route sont complémentaires. Selon lui, des études sur le potentiel de fret ferroviaire laisseraient augurer un effet d’entraînement, obligeant en retour à moderniser la route.
Les « politiques » sont un peu moins enthousiastes. Jean-Jacques Lasserre, président du conseil départemental, admet que le sujet l’intéresse mais ne souhaite pas que le Département soit moteur dans l’affaire : « S’agissant d’une route nationale et d’un axe international, cela pourrait marcher à la condition que cette action s’inscrive dans un partenariat avec l’État et la Région ».
Le député socialiste David Habib se montre aussi quelque peu sceptique, notamment sur la route Pau-Oloron : « L’infrastructure se justifie mais sans tracé consensuel, ni financement, je vois mal ce qu’on peut faire. »