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Le projet de sécurisation de cette route accidentogène a été approuvé par la commission d’enquête. Une étape importante pour les riverains des communes concernées

« On entend parler de modifications sur la RN 134 depuis 1989. Ça n’a que trop tardé. » Comme d’autres riverains d’Ogeu-les-Bains, Gérard Caussimont se félicite de l’avancée du projet de sécurisation de la route nationale 134.

Le 10 juillet dernier, suite aux résultats de l’enquête publique réalisée dans dix mairies concernées par le projet, la commission d’enquête a émis un avis favorable à la déclaration d’utilité publique du projet de mise en sécurité de cette route, entre la commune de Buziet et celle d’Oloron Sainte-Marie. Une des portions de route les plus chargées de la RN 134, mais aussi une des plus accidentogènes.

De 2008 à 2018, 14 accidents ont fait 24 victimes sur cette route. Quatre sont décédées. « Quand mes enfants étaient adolescents, je leur interdisais d’avoir un scooter. J’avais trop peur qu’ils se fassent tuer, raconte Gérard Caussimont, pointant du doigt l’étroitesse des voies. Aujourd’hui, on a une route internationale qui n’a même pas le gabarit d’une route départementale. Il suffit de faire un petit écart à droite pour partir en tête à queue ou faire un tonneau dans le fossé. »

À cette problématique, s’ajoutent des comportements routiers dangereux. « Beaucoup de camions roulent à une vitesse folle, se doublent entre eux… C’est du grand n’importe quoi. Des véhicules dans le fossé, il y en a presque toutes les semaines », déplore un habitant du Hameau supérieur d’Ogeu.

Axe européen

À ce jour, les poids lourds représentent seulement 5,5 % du trafic quotidien. Néanmoins, le balai des camions est incessant sur cet axe européen qui relie la France et l’Espagne, de Pau à Saragosse via le tunnel du Somport. Depuis la mise en place d’une écotaxe côté espagnol, le trafic de camions s’est intensifié sur la RN 134, devenue de plus en plus dangereuse.

« L’enjeu fort du projet de mise en sécurité de la RN 134 est de limiter l’accidentologie, d’améliorer les flux de circulation, de contrôler la vitesse et de limiter les nuisances du trafic pour les riverains », explique le rapport d’enquête du commissaire enquêteur.

Concrètement, le projet de sécurisation prévoit un élargissement de 7 mètres des deux voies de circulation, auxquelles s’ajouteront des voies multifonctions de 2 mètres destinées aux cyclistes et aux engins agricoles. Un certain nombre d’accès à la RN 134, jugés trop dangereux, seront également supprimés. Des contre-allées et des carrefours seront aménagés.

Riverains entendus

« Au niveau d’Ogeu, nous avons eu gain de cause. Tout ce que nous avons réclamé lors de l’enquête publique a été retenu dans le projet », explique Gérard Caussimont, chargé de faire le relais entre les revendications des riverains et la municipalité d’Ogeu-les-Bains.

« On est satisfait du projet. Maintenant, nous espérons que toutes les choses qui sont écrites sur le papier seront bien réalisées », souligne-t-il. En effet, l’enquête publique a permis aux riverains d’Ogeu-les-Bains de conserver la sortie de la côte du Camy et de créer une arche pour les engins agricoles à Pont rouge.

« Le danger sera toujours là »

Du côté de Buziet, certains riverains sont moins enchantés par le projet de sécurisation. « Ça ne pourra pas être pire que ce qu’on a actuellement, mais au niveau du risque je pense que ça ne changera rien. Tant que les habitations ne seront pas séparées de la route, le danger sera toujours là », souligne Amandine Benhacoun, propriétaire d’une maison située le long de la RN 134. Elle ajoute :

« Pour rentrer et sortir de chez nous, c’est super dangereux. Quand on va chercher le courrier, on serre les fesses. On sent qu’on se fait aspirer par les camions. Ça ne devrait pas exister une maison aussi proche de la route »

Devant sa maison, la route sera élargie par le Sud de façon à éloigner la chaussée des habitations. Des travaux qui nécessiteront des acquisitions foncières supplémentaires, dont certaines parcelles agricoles. Au total, 5,6 hectares de terrains agricoles seront réquisitionnés et 35 exploitations seront concernées.

André Béquaas, agriculteur retraité à Ogeu-les-Bains, propriétaire d'un terrain qui pourrait être réquisitionné
André Béquaas, agriculteur retraité à Ogeu-les-Bains, propriétaire d’un terrain qui pourrait être réquisitionné

Crédit photo : Quentin TOP

« Ça me dérange un peu, mais on ne peut pas s’y opposer », confie André Béquaas, agriculteur retraité à Ogeu-les-Bains. Le septuagénaire –propriétaire d’un terrain sur lequel est planté du maïs– a été informé de la nouvelle par un voisin. « Il m’a dit qu’ils prendraient peut-être un bout de 10 mètres sur 50. Tant qu’à faire, autant qu’ils prennent tout ! », lance-t-il, dans l’attente d’une réunion avec le maire pour avoir plus d’informations sur le projet.

Exploitants indemnisés

Selon le rapport d’enquête publique, les propriétaires et exploitants concernés par une perte de surface seront indemnisés financièrement ou obtiendront de nouvelles parcelles. « Globalement, les terrains qui sont touchés le sont à moins de 2 %. Pour certains exploitants, des mesures ont déjà été prises », assure Francis Larrivière, directeur adjoint de la Direction interdépartementale des routes atlantiques (Dira), l’organisme en charge de l’étude et de la coordination du projet.

Avant que les travaux puissent débuter, la préfecture des Pyrénées-Atlantiques doit délivrer un arrêté de déclaration et d’utilité publique. En 2020, une enquête parcellaire et une enquête publique environnementale devront également déterminer la faisabilité du projet