Béarn-Bigorre : 40 projets pour se donner un avenir industriel

Mar 26, 2019 | Economie, Presse française

  • Air Liquide porte par exemple un projet de production d’hydrogène vert par électrolyse.

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    Les élus, représentants de l’Etat et du monde industriel étaient ce lundi à Pau pour la signature du protocole d’accord.

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    Plusieurs projets de méthanisation sont inscrits dans le plan 2019-2022.

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Par Pierre-Olivier Julien, publié le , modifié .

Le territoire Lacq-Pau-Tarbes a été identifié par l’Etat « Territoire d’industrie » pilote. Il peut ainsi espérer toucher des aides financières pour des actions sur les quatre ans à venir.

Est-on à l’aube d’une nouvelle révolution industrielle ? En signant ce lundi en mairie de Pau un protocole d’accord, les intercommunalités du Béarn et celles de la Bigorre ont formalisé cette ambition. Réunies sous l’appellation Lacq-Pau-Tarbes, elles ont été identifiées comme « pilote » par l’Etat dans le cadre de son nouveau dispositif « Territoire d’industrie » qui veut accompagner financièrement la « reconquête industrielle de la France ». Pour ce faire, 1,36 milliard d’euros seront disponibles et comme bien souvent, les « plus prêts et les plus stratégiques », comme le remarque François Bayrou, seront les premiers servis.

« Des signes de fléchissement »

En quelques semaines donc, on s’est dépêché localement de bâtir un programme de 40 actions qui sera intégré au contrat 2019-2022 appelé à être signé d’ici mai avec l’Etat et les régions Nouvelle-Aquitaine et Occitanie qui piloteront le déploiement.

En Béarn-Bigorre, même si la compétitivité industrielle reste à un bon niveau (tirée par les géants de la chimie, des hydrocarbures et de l’aéronautique), il est surtout apparu essentiel d’anticiper les mutations à venir. « Car le modèle industriel territorial montre désormais des signes de fléchissement, amplifiés par des fragilités structurelles du bassin industriel Lacq-Pau-Tarbes » indiquent les acteurs. Et le maire de Tarbes Gérard Trémège de rappeler pour son agglo la perte de 7 000 emplois industriels durant la dernière décennie. « C’est pourquoi on a une obligation de résultats, les plus rapides possibles ».

La reconquête passera chez nous plutôt par l’accompagnement du développement du tissu PME-TPE, la diversification des activités, la pérennité des entreprises en explorant de nouveaux marchés. Et sur ce dernier point, c’est la transition énergétique qui nourrira de nombreux projets.

Les nouvelles énergies en pointe

Pas un hasard, par exemple, de voir Lacq-Pau-Tarbes s’intéresser de près à l’hydrogène, « les quatre prochaines années pourraient constituer une période décisive tant pour l’émergence d’une production propre et décarbonnée d’hydrogène que pour le développement de nouvelles applications de l’hydrogène-énergie » notent les parties prenantes. Parmi les actions proposées, on peut d’ailleurs citer le projet d’une unité de production d’hydrogène vert par électrolyse porté par Air Liquide sur le bassin de Lacq (décision en 2020).

Le thème des nouvelles énergies pourra aussi se décliner localement par des installations de méthanisation. Celle traitant d’effluents agricoles, portée par Méthagri-Pau-Est qui traitera les effluents de 10 agriculteurs mais aussi du domaine équin de Sers. Ou encore celle que Fonroche veut implanter en 2021 à Mourenx et qui fonctionnera à partir des déchets agricoles et d’élevage d’exploitants du groupe Euralis. Sans oublier l’unité de biométhanisation pour le traitement des boues usées avec valorisation énergétique photovoltaïque chez Cap Ecologia à Lescar.

Dans le plan d’actions, on a aussi pu découvrir le projet porté par Suez, baptisé « Pavillon vert » destiné à produire de la vapeur et de l’électricité sur le site à reconvertir de Pardies-Noguères, mis à mal ces dernières années par les fermetures de Péchiney, Celanese et Yara.

À côté des industries d’avenir, les collectivités ont voulu aussi développer un volet mobilités. Et d’y trouver la construction en 2021 d’une station de GNV et bioGNV par le Sdepa, la réalisation d’un taxiway pour raccorder la zone d’activité Aerosite aux pistes de l’aéroport de Pau pour 2022 ou encore la création d’une halte ferroviaire à Bordes-Assat.

L’accent sur le recrutement

Enfin, si plusieurs actions de marketing territorial sont également envisagées, comme pour les filières aéronautiques et bois-forêt, c’est au recrutement de salariés que Lacq-Pau-Tarbes voudra aussi s’attacher. Pour cela, le Territoire d’industrie pilote souhaite palier le manque d’attractivité du secteur grâce à la mise en place de nouvelles formations supérieures. D’où les projets de créer une licence professionnelle à l’IUT de Tarbes dans le domaine de la réalité virtuelle pour septembre 2020, un master à l’ENIT autour de l’industrie 4.0 ou encore instaurer un forum de l’emploi industriel spécifique pour le Haut-Béarn dès cette année.

 

François Bayrou : « Une démarche inédite et nécessaire »

Ce n’était pas la salle des mariages de la mairie de Pau mais celle du conseil qui avait été choisie pour célébrer la signature du protocole d’accord entre le Pays de Béarn, l’agglo de Tarbes-Lourdes, les CC de la Haute-Bigorre et du Pays de Nay. Pourtant, c’est bien d’union sacrée dont les élus ont nourri leurs discours ce lundi.

« Un jour à marquer d’une pierre blanche » a souligné le maire de Pau François Bayrou qui voulait saluer « une démarche très importante, inédite et nécessaire. Elle permet d’affirmer notre ambition industrielle, trop souvent méconnue. Vus de loin, Béarn et Bigorre apparaissent sympathiquement ruraux. Sympathiques nous le sommes, comme ruraux. Mais nous sommes aussi des territoires denses et en avance en terme d’industries. Il faut faire valoir cette identité, cette culture industrielle qui remonte à loin dans notre histoire » rappelait François Bayrou.

Et le président du Pays de Béarn de se satisfaire, devant une assemblée bien fournie, que « tout le monde est là ». Oubliés les chicayas, semblait-il en effet, entre territoires, « alors que les Pyrénéens ont plutôt l’habitude de mettre en avant leurs singularités plutôt que de jouer collectif » souriait l’élu palois. Même le Pays de Nay, rétif encore à rejoindre le pôle métropolitain béarnais, était de la partie.

« Tout ceci n’est pas folklorique, ensemble nous sommes irrésistibles » a avancé François Bayrou. Des déclarations qu’a reprises au bond le maire de Tarbes Gérard Trémège, lui qui rêve depuis longtemps d’un tel rapprochement. Et qui avait même préféré que le 65 rejoigne la Nouvelle-Aquitaine plutôt que l’Occitanie quand les grandes régions avaient émergé.

Un pôle métropolitain commun ?

Pour l’heure, il faudra se contenter de cette coopération industrielle. Gérard Trémège, lui, proposait encore de faire tomber les frontières et de soumettre la création d’un pôle métropolitain Béarn-Bigorre. On n’en est pas là, si l’on écoute François Bayour qui nous confiait en marge de la signature qu’il n’était pas favorable à des structures « démesurées ».

Restait la façon de voir de Christian Petchot-Bacqué, président de la CC du Pays de Nay, qui affirmait sans ambages que le « Béarn-Bigorre » existait déjà, « moi, j’ai deux préfets, deux patries ». Mais le reste de la chanson reste à écrire.

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