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Le président de la Région Nouvelle-Aquitaine a profité de ses voeux à la presse ce jeudi matin pour adresser quelques messages, plus ou moins directs, au gouvernement.
Près d’une heure de discours et plus d’une demi-heure de questions-réponses. Alain Rousset adressait ce jeudi matin ses voeux à la presse régionale. Un rituel immuable qui sert à faire passer quelques messages externes ou internes. En voici les points saillants.
1 – La fusion des régions : « le boulot est remarquablement fait »
En début de semaine, le président néo-aquitain s’est exprimé devant le personnel, à Bordeaux et Poitiers, dans une ambiance plus tendue. À Bordeaux, une bonne quinzaine d’agents a applaudi sans discontinuer le président pendant les 40 minutes de son allocution sans que celui-ci s’interrompe. À Poitiers, des agents ont en revanche interrompu à plusieurs reprises Alain Rousset.
« Fusionner trois régions ne s’est jamais fait en France »
» Il y a un sentiment de malaise et d’inquiétude que je perçois et, en même temps, le boulot est remarquablement fait. C’est vrai qu’on a plus travaillé sur le quantitatif que le qualitatif mais la première préoccupation c’est que la machine ne s’arrête pas. Fusionner trois régions ne s’est jamais fait en France, nous sommes la seule avec Grand Est. Bretagne, Ile-de-France ou PACA, c’est cool… Le boulot a été fait par tous les élus grâce à leur présence territoriale parce que la région n’existe que si elle s’incarne sur le terrain. On a voté des milliers de délibérations. J’en suis extrêmement fier. On ne s’est pas regardé les pompes, on a bossé et les agents y contribuent. Faire une seule administration à partir de trois, c’est extrêmement compliqué. La rédaction de fiches de poste a pris du temps, il y a des métiers qui changent et puis il y a trop de postes vacants parce que la réorganisation a supposé des déplacements et des départs. Mais nous avons des difficultés de recrutement, comme dans le privé. Pour ce qui est enfin des rémunérations, il y a un chiffre incontestable : + 17 millions d’euros pour les catégories C Limousin et Aquitaine que nous alignons sur ceux de Poitou-Charentes. Au bout de trois ans, cela fera un mois de salaire supplémentaire. »
2 – Les transports : « Un nouveau mode de financement de la LGV »
Pour le président de Région, la décision gouvernementale d’abandonner le projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes « peut inquiéter ».
» Je ne sais pas s’il y avait d’autres choix possibles mais il y a eu un référendum, les décisions des collectivités locales, alors on ne peut pas accepter que quelques dizaines de personnes utilisent la violence pour bloquer la réalisation d’un projet. Le cas Notre-Dame-des-Landes oblige à avoir une réflexion sur la démocratie. Evidemment, ce dossier interpelle aussi sur le projet de LGV Bordeaux-Toulouse. Ceux qui pensent qu’il ne faut pas faire de LGV vont favoriser le développement des aéroports et des camions. Il y a 9 300 camions par jour qui traversent notre Région et asphyxient la métropole bordelaise. Donc, il faut trouver des nouveaux sillons ferroviaires. C’est quand même facile à comprendre. En Aquitaine, nous avons des lignes ferroviaires qui datent du 19ème siècle. Affirmer qu’on peut rénover cette voie pour permettre aux trains de circuler plus vite, cela revient à supprimer la circulation de tous les trains pendant deux ans. Opposer les trains dits du quotidien et les trains à grande vitesse est une idée absurde et indémontable, sauf sur le plan financier. C’est pourquoi Carole Delga (président de l’Occitanie) et moi avons proposé à la ministre des Transports un nouveau mode de financement. C’est au gouvernement qu’il appartient de présenter un modèle soutenable. »
3 – Apprentissage : « Le Medef est totalement illégitime pour en parler »
Le président de Nouvelle-Aquitaine s’est dit » très inquiet sur la façon dont l’Etat fait de la concertation. Il y a une idée initiale, le reste, c’est de l’habillage. »
Allusion très claire à l’apprentissage que l’Etat veut retirer aux Régions pour le transférer aux branches professionnelles. Sous la houlette de leur président Hervé Morin, les Régions de France refusent de se laisser dépouiller de cette compétence héritée des lois de décentralisation de 1982.
» Ce serait un recul historique de la décentralisation » prévient Alain Rousset qui rappelle que c’est le quinquennat Hollande qui a attribué aux Régions une part importante de la taxe d’apprentissage.
« Voilà une réforme qui va tuer les territoires »
» Il y a peut-être deux ou trois Régions à la traîne mais nous, en Nouvelle-Aquitaine, nous ajoutons 17% à cette taxe. » » Le Medef est totalement illégitime pour parler d’apprentissage. Combien d’apprentis M. Gattaz a-t-il dans son entreprise ? 70% des apprentis sont chez les artisans. Le risque, c’est la fermeture de centaines de CFA en France. Exemple avec la réparation automobile : il y a 110 CFA en France. 40 sont aidés par les branches et uniquement dans les grande villes. Que deviennent les 70 autres ? Ils ferment. Voilà une réforme qui va tuer les territoires. Je ne peux pas l’accepter. Je ne peux pas accepter la disparition de CFA à Châtellerault, Mauléon, Cognac ou Barbezieux. Il faut qu’on se réunisse vite à l’Association des Régions de France. C’est ce que je faisais quand je la présidais. Il faut forcément un consensus entre nous, sinon çà ne marche pas. »
Alain Rousset a par ailleurs annoncé qu’il réunirait le 29 janvier prochain à Angoulême ou Bordeaux les chambres de commerce et d’industrie, les Chambres des Métiers, les chambres d’agriculture et toutes les organisations professionnelles pour évoquer le dossier.