En décembre 2010, l’autoroute A65 était mise en service. Mais les tarifs pratiqués aux péages (ici celui de Lescar) en firent l’une des plus chères de France.
L’État estime que l’autoroute Langon-Pau fait la preuve de son utilité en dépit de son faible impact sur le développement économique et d’un trafic inférieur aux prévisions.
L’avis du ministère de l’Environnement sur l’A65, l’autoroute Langon-Pau, était attendu depuis 2015. Il a finalement été mis en ligne sans effet d’annonce au début de l’été. (1)
Sept ans après l’ouverture controversée de ce barreau de 150 km, l’État, par l’entremise du Conseil général de l’environnement et du développement durable, (CGEDD) juge le bilan « globalement de bonne qualité » même si l’A65 ne génère pas le développement économique escompté.
Un trafic surestimé
Même si elle croit, la fréquentation reste très largement en deçà des prévisions d’Aliénor, la société concessionnaire détenue à 65 % par le groupe Eiffage.
« Les hypothèses de trafic se sont révélées surestimées » relève le CGEDD. De 4 à 53 % pour les voitures et de 30 à 60 % pour les poids lourds selon les sections.
Les reports de circulation en provenance des départementales voisines de l’autoroute sont largement inférieurs aux attentes, surtout dans la moitié sud, entre Mont-de-Marsan et le Béarn. Et cela malgré les arrêtés préfectoraux qui ont interdit aux camions d’utiliser ces axes secondaires.
L’une des autoroutes les plus chères de France
Après avoir essuyé 125 millions d’euros de pertes entre 2011 et 2014, A’liénor dégage des bénéfices depuis 2 ans bien que la fréquentation soit freinée par le prix des péages, trois fois supérieurs à ceux envisagés lors de l’attribution du contrat de concession. 0,13 € du kilomètre au lieu de 0,04 € pour les voitures, 0,40 pour les poids lourds au lieu de 0,12. Résultat l’A65 est l’une des autoroutes les plus chères de France.
Plutôt que de fixer des tarifs relativement bas pour accueillir davantage d’usagers, les actionnaires d’A’liénor ont préféré les relever afin de maximiser les gains générés par une circulation plus réduite mais captive, invoquant les effets négatifs de la crise sur la croissance du trafic.
Même si nombre d’automobilistes aux revenus modestes ne peuvent l’emprunter, l’A65 affiche une rentabilité socio-économique de 8 %, le double du taux a partir duquel le ministère de l’Environnement estime qu’une opération est utile à la collectivité. Selon cet indicateur qui évalue financièrement coûts et avantages d’un équipement au regard de la situation initiale, l’A65 rencontre l’intérêt général.
Un bon bilan environnemental
« Le dispositif de suivi écologique mis en place par A’lienor semble avoir été à la hauteur des engagements de l’Etat », relève par ailleurs le CGEDD. Lutte contre bruit, protection des zones humides, intégration paysagère, rétablissements hydrauliques destinés à maintenir les habitats du vison, du fadet des laiches ou de la lamproie de Planer, sanctuarisation de 1 500 hectares pour compenser les atteintes à la biodiversité : toutes les cases prévues ont été cochées par le concessionnaire.
Défaut de transparence
Prolixes lorsqu’il s’agit d’évoquer leurs efforts pour verdir l’autoroute, les dirigeants d’A’lienor sont moins diserts sur les économies réalisées sur les dépenses entretien et d’exploitation ou sur la rentabilité financière de l’exploitation.
« Cette absence d’information est constitutive d’un défaut de transparence dommageable dans une période ou les contrats autoroutiers font l’objet de controverses sur les profits des concessionnaires » déplore le CGEDD.
Ce dernier relativise aussi sérieusement l’impact en terme de développement économique de l’A65 sur le territoire aquitain.
« Les effets sont assez limités et globalement moindres que ceux attendus… In fine, l’A65 semble surtout profiter à l’agglomération de Pau. »
Le compte n’y est pas. Il n’y est pas davantage en terme de sécurité routière. L’A65 est plus accidentogène que la moyenne du réseau autoroutier, la fréquence des accidents s’étant par ailleurs aggravé sur l’ancienne nationale, l’axe historique, en dépit d’une baisse du nombre des tués.
(1) La loi Loti de 1984 impose au maître d’ouvrage d’un grand projet d’infrastructure d’établir un bilan des résultats économiques et sociaux au plus tard 5 ans après la mise en service de l’équipement. Bilan ensuite soumis à l’avis du Conseil général de l’environnement et du développement durable.