PERIODICO DE ARAGON
Jorge Heras Pastor
Zaragoza 06 DEC 2024
Le pays voisin de l’Aragón de l’autre côté des Pyrénées ne vit pas son meilleur moment. La chute du Gouvernement de Michel Barnier, après le succès d’une motion de censure de la gauche soutenue par l’extrême droite de Marine Le Pen, serre un nouveau cran à la profonde crise politique que traverse le pays, à laquelle s’ajoutent les sérieux problèmes économiques que connait le pays. Une instabilité qui ne présage rien de bon pour les intérêts de la communauté autonome, dont Paris est le principal partenaire commercial à l’étranger.
L’économie aragonaise est vulnérable aux ennuis de santé d’une des principales puissances européennes. Et cela, malgré l’état précaire des connexions frontalières existantes entre les deux territoires, avec trois médiocres passages routiers –le Pourtalet, le Somport et le tunnel Bielsa-Aragnouet– avec peu d’espoir d’amélioration à court et moyen terme. Les revendications historiques existantes de ce côté-ci de la frontière en faveur de communications routières et ferroviaires à grande capacité n’ont pas débouché jusqu’à présent.
La France occupe depuis toujours la première place pour les exportations de l’Aragón, avec 3,575 milliards d’euros l ‘an dernier, le maximum historique après une hausse annuelle de 18,9% sur 2022 (3.032 millions). Suivent de loin l’Allemagne (2.840 millions), l’Italie (1.890), le Royaume Uni (1.198), le Portugal (1.175) et la Turquie (750), (—).
Les ventes sur le marché français représentent 20,2% du total des exportations de la région, qui s’est situé en 2023 à 17.625 millions à prix courants, chiffre record de la série statistique.
Sur 2024, le flux commercial avec « le pays de la grandeur » reste stable. Les exportations de la communauté autonome vers Paris atteignaient 2.703 millions à fin septembre, en légère hausse de moins d’un point par rapport à 2023.
Que vend l’Aragón à la France ?
L’automobile représente la majeure part des exportations de la communauté sur ce marché, avec 1.294 millions en 2023, (36 % du total). Viennent loin derrière les vêtements (217 millions), les machines et appareils mécaniques (179), le matériel électrique (173), les matières plastiques (170), la viande et les abats comestibles (165), le papier et carton (146), la chaussure (119), les céréales (107), le fer et l’acier manufacturés (102).
Sur le secteur alimentaire aragonais, la France est également la principale destination des exportations, à presque 500 millions d’euros en 2023, en hausse de 23% sur 2022 (—). Les produits carnés représentent 40% du total, suivis des produits agro-alimentaires –un sous-secteur en forte croissance– et les fruits.
Les craintes de l’Aragón face à l’instabilité en France
Les importations en Aragón en provenance du pays voisin sont tout aussi importantes que les exportations. C’est également le premier fournisseur international de la communauté, avec un volume d’achat qui s’est situé à 4.225 millions en 2023, également un record historique après un bond de 131% par rapport à l’exercice précédent (1.827 millions).
La France est l’origine de 23% des importations de la région, qui ont atteint 18.575 millions l’an dernier. Suivent de loin la Chine (2.329 millions), l’Allemagne (2.296), le Portugal (1.348), le Maroc (1.166) et l’Italie (813).
Une voie vers l’internationalisation
Outre le commerce extérieur, la France est également une des premières options pour les entreprises aragonaises qui souhaitent s’internationaliser, du fait de sa proximité et des liens qui existent entre les secteurs productifs. Parmi les grandes entreprises de la capitale aragonaise, il existe des exemples de présence importante sur le marché français. C’est le cas de Pikolin, qui possède en France quatre usines avec 900 emplois et qui est leader sur son marché avec trois marques. Egalement Saica, qui possède 22 établissements dans ce pays, et plus de 2.300 emplois directs.
La présence française en terre aragonaise est également importante, avec Auchan (distribution alimentaire), Valeo Térmico (sous-traitant de l’automobile), ARC (verrerie), HMY Yudigar (équipement commercial), Oerlikon Soudure, Veralia (verre) ou Grumetal (métallurgie).
Ces chiffres montrent clairement le rôle essentiel que joue la France dans le tissu industriel de la communauté, tant comme destination de ses productions que comme origine de ses importations. C’est ce qui explique que les institutions, entreprises et agents économiques d’Aragón suivent de près tout ce qui se passe là-bas en raison des répercussions que pourrait avoir un refroidissement de son activité.