Où se situera le futur échangeur de Morlaàs-Berlanne ? La question se pose encore et ASF étudie actuellement la faisabilité de cinq sites. Mais le fait qu’il n’y ait pas encore consensus freinerait le dossier.
Le projet d’échangeur sur l’A 64 au Nord-Est de Pau n’a pas reçu de feu vert ce mercredi. Pour certains, le manque de consensus sur le site a joué ; pour d’autres, l’attentisme de l’Etat est en cause.
« Tout est acté, le dossier est accepté. Ne reste plus qu’à démarrer les travaux… » L’optimisme du maire de Morlaàs Dino Forte, dans nos colonnes début juillet, à propos de l’échangeur autoroutier de Morlaàs-Berlanne, n’est sans doute plus d’actualité aujourd’hui. Ce mercredi, l’Etat donnait (enfin) son feu vert à la réalisation de nouveaux diffuseurs sur l’A64, à Orthez et Carresse-Cassaber (notre édition de ce jeudi). Mais aucune nouvelle de celui qui doit soulager le Nord-Est de Pau.
C’est pourtant, des trois, le projet le plus ancien. C’est aussi, dans l’ordre des priorités des autorités locales, celui qui est mis en avant. Mais c’est aussi le plus onéreux, plus de 19 millions d’euros. Alors, qu’est-ce qui coince réellement dans les tuyaux pour que cet échangeur de Morlaàs paraisse désormais davantage comme une utopie qu’un projet bien ficelé ?
En coulisses, on cible des mésententes sur la future implantation de l’échangeur. « Et l’Etat a profité qu’aucune solution ne soit encore arrêtée pour botter en touche » souligne un proche du dossier. Selon nos informations, il existe actuellement cinq variantes du projet, « qui sont étudiées par le concessionnaire, la société ASF, pour leur faisabilité » nous assure-t-on. Cinq options, avec ou sans nouveau pont à construire au-dessus de l’A 64, cinq sites s’étalant sur quelques centaines de mètres de part et d’autre de la zone de Berlanne. « Les solutions plus logiques, pour désengorger le Nord de Pau, se situent du côté d’Idron-Sendets » affirme André Arribes, élu départemental en charge des routes. Jusqu’à, par exemple, la route de Morlaàs (RD 38), où l’on pourrait profiter du pont existant, « il suffirait de créer des bretelles ».
Côté Idron, ou côté Térega
Tout le monde semblait à l’unisson pour que le nœud autoroutier penche ainsi à l’Est de l’agglo. Sans trop se rapprocher d’un lotissement de Berlanne dont les habitants avaient commencé à faire savoir leur opposition. Mais en début d’année, le maire de Pau François Bayrou a poussé pour que l’échangeur s’implante sur les parcelles libres derrière Térega (ex-TIGF).
Une proposition qui a fait grincer le Pays de Morlaàs et jusqu’au Département. Pour certains, l’idée paloise ne ferait que déverser le flot de voitures sur une rocade déjà engorgée. Et serait encore plus onéreuse. Bref, le site de l’échangeur ne fait pas encore consensus, « il faut déjà qu’on se mette d’accord entre nous » affirme un élu. Cependant, pour le président du Conseil départemental, Jean-Jacques Lasserre, cette question d’implantation « n’est qu’un alibi ».
L’élection de Macron a changé la donne
Lui ne croit pas que ces discussions, qu’il juge « naturelles », aient « entravé » la volonté de faire, « on tombera sur un accord, facilement, ce n’est pas ça l’obstacle ». Pour le patron du 64, le problème semble plutôt venir de l’Etat, et de son attentisme. « De notre côté, on a pris une part très active à la mise en place de ces échangeurs. Avec l’ancien préfet, on avait tenu une série de réunions pour parler de la contribution des collectivités et nous étions tombés sur un accord pour Morlaàs, Orthez et Carresse-Cassaber » rappelle Jean-Jacques Lasserre.
Mais l’élection d’Emmanuel Macron a changé la donne et le gouvernement s’est adossé au point de vue du régulateur (l’Arafer) qui avait tiqué sur le financement de l’échangeur qui devrait être « naturellement » pris en charge par le concessionnaire. « Cependant, le ministère, fin 2017, m’avait laissé quelques lueurs d’espoir. Sans nouvelle de leur position, j’avais encore récemment écrit à Elisabeth Borne » souligne le président.
« J’ai été déçu », note J.-J. Lasserre
En guise de réponse, cette dernière a laissé de côté Morlaàs à travers les annonces de ce mercredi. « J’ai été déçu. Mais j’espère que ceci veut dire que le gouvernement est en train d’étudier la formule la plus adaptée, étant donné que cet échangeur est inscrit dans la convention avec ASF (il est à réaliser d’ici 2032, NDLR). C’est l’argument qui a été retenu semble-t-il. Si la cause du retard, c’est un réexamen du projet, ce n’est pas grave. Si ce n’est pas ça, c’est un problème sérieux » avance Jean-Jacques Lasserre.
Et le président de rappeler que les collectivités, elles, se sont engagées financièrement (1,8M pour le Département, 1,4M pour l’Agglo de Pau, 0,8M pour la CC Nord-Est Béarn). « Le gouvernement, lui, a décidé de revisiter les maquettes financières, considérant qu’elles faisaient appel à des financements publics importants, et que cela méritait d’être revu. Mais je n’ai aucune nouvelle sur ce point » déplore Jean-Jacques Lasserre qui compte donc relancer l’Etat.
Dessertes : « Pau est en retard »
L’impatience s’entend aussi dans sa voix. Et pas question que l’Etat ou ASF lui rétorquent qu’ils manquent de moyens. « Sur les dessertes, Pau est en retard. Alors que, regardez autour de Bayonne, il y a 5 échangeurs sur 10 km. Qu’on ne vienne pas me dire qu’il y a déjà trop d’échangeurs ! »
Reste que la balle semble bien dans le camp d’ASF (que nous n’avons pu joindre ce jeudi), « c’est cette société qui a la maîtrise du temps. Et si l’Etat ne pousse pas à la roue, elle n’a aucune raison de s’auto-saisir du sujet » relève un proche du dossier. Alors, dire qu’on peut espérer un échangeur à Morlaàs pour 2021 ou 2022, comme parfois promis, cela semble aujourd’hui bien périlleux.
Les entreprises s’impatientent
Du côté des professionnels, nouvelle déception, « on s’impatiente » confirme l’architecte Thierry De Verbizier, le président de l’Association Berlanne Entreprises, « une telle infrastructure apporterait un plus, c’est indéniable. Je vais réunir nos adhérents à la rentrée et voir, avec les élus, ce qu’on peut faire pour que cela aboutisse ». Récemment, le groupe Essor, par exemple, qui développe plusieurs projets vers la zone Europa (Legrand, Polaris) nous confiait que les entreprises avaient grandement besoin de facilité d’accès.
Lasserre regardera aussi de près la liaison avec l’A63
Le président du Conseil départemental a aussi salué la décision « très positive » pour Orthez. Pour Carresse-Cassaber, il a rappelé que le projet était « à double détente : l’échangeur, mais aussi la bretelle autoroutière entre Peyrehorade et l’A63 qui va à Bordeaux. J’attends de voir avec précision si ce branchement sera bien pris en considération ».